jeudi 18 juin 2009

Obama met Bibi sous pression



Proche-Orient. Le président américain veut contraindre Nétanyahou, qui tergiverse.
Nathalie Harel
C’est la réponse du berger à la bergère. Depuis le centre Begin-Sadate (Besa),de l’université de Bar-Ilan,Benyamin (“Bibi”) Nétanyahou a livré,dimanche 14juin,sa réplique au discours du Caire du 4 juin de Barack Obama.Après avoir refusé d’évoquer publiquement le principe d’un futur État palestinien,il a fini par envoyer un message sous forme de “oui mais”.

Oui à la création d’un État palestinien démilitarisé,à la condition que les Palestiniens reconnaissent Israël comme l’État du peuple juif.Non à l’arrêt brutal des constructions dans les colonies existantes de Cisjordanie. Perçue comme un pas en avant par Washington, cette adresse a provoqué la colère de l’Autorité palestinienne. Elle considère que Nétanyahou «torpille les efforts de paix ». Les éléments les plus droitiers de la coalition israélienne dénoncent « la trahison » de leur champion.

Il est vrai qu’en cautionnant pour la première fois l’idée d’un futur État palestinien, le chef du Likoud a d’abord cherché à apaiser les craintes de la communauté internationale. À la veille d’un Conseil d’association Union européenne- Israël, censé débattre du rehaussement des relations économiques avec l’État hébreu,Bibi a préféré calmer le jeu.Échaudée par la guerre de Gaza,l’Union a en effet menacé de geler le renforcement de ses liens avec Israël, afin de peser sur la relance du processus de paix.

C’est d’abord pour stopper la dégradation des relations avec les États-Unis, que Nétanyahou a accepté de s’assouplir. Obama,comme son envoyé spécial au Proche-Orient George Mitchell,n’a eu de cesse de réclamer le gel immédiat de la colonisation en Cisjordanie.Cette exigence est d’autant plus intenable pour Bibi qu’elle le priverait ipso facto du soutien de la droite religieuse, pilier de sa coalition. Faut-il parler de crise ouverte avec


Washington? Dans l’entourage de Bibi, certains pensent qu’Obama est prêt à aller à l’incident,sous l’influence de son plus proche conseiller Rahm Emanuel, d’ascendance israélienne, pour pousser sa politique de réconciliation avec le monde arabe.D’autres préfèrent voir dans le discours du Caire un simple changement de style.

«Des tensions existent avec la Maison- Blanche, mais il est trop tôt pour parler de crise », estime Gerald Steinberg, du think tank israélien Besa. À court terme, il ne croit pas à des sanctions américaines: « Pendant des années, les deux pays ont évité de parler des sujets qui fâchent, comme la colonisation,nous avons aujourd’hui l’occasion de le faire.»

Cette relation israélo-américaine repose sur des fondamentaux qui sont loin d’être exclusivement liés au conflit avec les Palestiniens.Ainsi, Israël bénéficie chaque année d’une manne américaine de 3milliards de dollars (les trois quarts vont à l’achat de matériels militaires américains)!

Les deux alliés ont connu des périodes de froid plus aiguës – sous Nixon, Carter,Reagan et Bush père – qui n’ont jamais entraîné de “lâchage”. « Ni les États-Unis, ni Israël n’ont intérêt à entrer dans une logique de confrontation, note Eytan Gilboa, de Besa. Jérusalem a trop besoin de l’appui américain dans le dossier iranien. » Il n’empêche que 63 % des Israéliens disent se méfier de la politique d’Obama. Celui-ci est accusé de ne pas prendre en compte “la logique de refus” qui caractérise le Hamas et le Fatah. « Depuis 1967, les Palestiniens ont eu, à plusieurs reprises, l’occasion de fonder leur État, et n’y sont jamais parvenus: le souhaitent-ils vraiment ? s’interroge Oded Eran, de l’INSS (Institute for National Security Studies) à Tel-Aviv. Il leur est peut-être plus confortable de ne pas disposer d’un État, synonyme de responsabilités et d’engagements. »


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