mercredi 11 février 2009

La contrebande vers Gaza rendue plus difficile par les Egyptiens


(Belga)

Dans les montagnes de décombres qui se dressent le long de la frontière sud de la bande de Gaza, les Palestiniens creusent pour dégager les tunnels et reprendre la contrebande. Mais de l’autre côté, les Egyptiens leur compliquent la tâche.

"Les Egyptiens se sont déployés partout, et ont installé des caméras. On a rien pu passer depuis quelques jours", explique Abou Mohammed, propriétaire d’un tunnel.

A quelques mètres de sa maison, des dizaines d’équipes déblayent, à la main ou avec des pelleteuses, les tunnels bombardés par Israël lors de sa récente offensive dans la bande de Gaza.

Celui d’Abou Mohammed n’a pas été touché et jusqu’à la semaine dernière, il faisait passer quotidiennement 15 tonnes de biens d’une valeur d’environ 12.000 dollars.

Israël et l’Egypte ont décidé d’un blocus de la bande de Gaza, où seule l’aide humanitaire vitale est autorisée à entrer, depuis que le mouvement islamiste Hamas y a pris le pouvoir en juin 2007.

Les tunnels, principalement utilisés pour faire passer des armes avant le retrait israélien de Gaza en 2005, servent désormais à maintenir à flot l’économie locale.

Israël, qui accuse le Hamas de les utiliser pour faire entrer à Gaza des armes fournies par l’Iran, assure avoir détruit une grande partie des boyaux durant la guerre. Des raids aériens ont encore été menés depuis l’arrêt des combats, le 18 janvier.

Mais la principale inquiétude des contrebandiers, ce sont les tentatives de l’Egypte, qui négocie une trêve entre Israël et le Hamas, pour mettre un terme à leurs trafics.

La semaine dernière, les forces égyptiennes ont détruit à l’explosif 15 tunnels et bouché l’entrée de plusieurs autres, a indiqué à l’AFP un responsable de la sécurité égyptienne à Rafah.

Par ailleurs, l’Egypte construit un système de sécurité high-tech, avec l’aide des Etats-Unis, pour empêcher la contrebande d’armes, une exigence israélienne dans le cadre des pourparlers sur la trêve.

Les Etats-Unis ont promis pour 25 millions d’euros d’équipement de détection de tunnels, et des ingénieurs militaires américains fournissent une aide technique sur le terrain.

Pour Abou Mohammed, les Egyptiens font des efforts pour faire pression sur le Hamas. "Si le Hamas accepte la trêve, alors les Egyptiens fermeront les yeux" sur les tunnels, estime-t-il.

En attendant, ils sont des centaines à travailler sans relâche pour reconstruire le réseau.

"Les Egyptiens font ce qu’ils peuvent", lance Abou Anna, qui regarde un groupe de jeunes garçons hisser des seaux remplis de débris.

"Mais ils ne peuvent pas fermer tous les tunnels, ajoute-t-il. Nous les faisions fonctionner quand les Juifs étaient juste à l’endroit où nous nous trouvons maintenant. Seul le gouvernement (du Hamas) peut mettre fin à la contrebande".

Sur les étals du marché Al-Nijma, au centre de Rafah, on trouve des cuisinières, fours à micro-ondes, générateurs et machines à laver encore recouverts de la poussière des tunnels.

Les prix ont grimpé depuis la fin de la guerre parce que les propriétaires de tunnels ont peur, explique Abou Dahoud qui vend des gâteaux et des chips fabriqués en Egypte. "Il y a moins de marchandises depuis deux, trois jours, dit-il. Ils savent qu’ils peuvent être fermés à tout moment".

Mais Abou Haithem, un autre vendeur, n’est pas inquiet. "On se débrouillera toujours, affirme-t-il. Si les Egyptiens installent des caméras, on construira des tunnels à un kilomètre de là".