lundi 5 janvier 2009

Iran – Etats-Unis : Dominos piégés à Gaza


Vingt jours avant la fin de son mandat, Bush utilise la force de son allié israélien pour affaiblir de manière significative le pouvoir de nuisance du régime des mollahs au Moyen-Orient, afin de les tenir à sa merci et leur imposer un pacte d’alliance et de soumission aux Etats-Unis. Mais jamais il n’aurait pu agir de cette manière, si les mollahs n’avaient pas poussé le Hamas à rompre la trêve.

Mais pourquoi diable les mollahs ont-ils poussé le Hamas à rompre la trêve et provoquer une attaque ? Ils espéraient diviser le monde arabe à un moment où la future administration Obama évoquait la création d’un front arabe de sanctions contre Téhéran. C’est une menace jugée très sérieuse par Téhéran car la majorité des transactions bancaires et financières du régime se fait depuis des années à partir des Emirats Arabes Unis. D’autre part, ce front arabe devait, via l’Arabie Saoudite et l’Egypte, multiplier les contacts avec Israël et les Palestiniens pour aboutir à une paix qui marquerait la fin effective du pouvoir de la nuisance régionale des mollahs, un pouvoir qui prospère dans le conflit.

Pour neutraliser ces deux menaces radicales, les mollahs ont décidé de neutraliser l’envie des Etats arabes de créer ce front solidaire avec les Etats-Unis. Ils ont donc démarré une vaste campagne médiatique via leurs télévisions arabophones sur le manque de solidarité des alliés arabes des Etats-Unis avec les habitants de Gaza avant de pousser le Hamas à rompre la trêve pour provoquer une attaque qui selon leur estimation allait désolidariser le front et même provoquer des fissures dans l’édifice des alliances arabo-américaines.

Ce choix machiavélique se retourne contre eux et devient suicidaire car l’affaiblissement militaire du Hamas signifie un affaiblissement de leur pouvoir de nuisance. Rappelons-le, la force des mollahs réside dans la puissance de leurs milices et non dans le nombre des manifestants musulmans à Paris ou à Bruxelles.

Téhéran, qui croyait semer le vent au Moyen-Orient pour récolter la tempête, est pris à son propre piège et risque de perdre des points décisifs dans son affrontement avec les Américains sur les clauses de l’entente qu’ils souhaitent tous les deux, tout en étant radicalement opposés sur son contenu.

Cette erreur de jugement de Téhéran à anticiper cette attaque fatale contre le Hamas et contre sa propre puissance de nuisance régionale résulte d’une situation particulière : la période confuse de transition entre Bush et Obama.

Dès son élection, Obama s’est montré très actif : il a nommé très rapidement Robert Gates à sa propre succession et ce dernier a entamé une tournée dans les pays arabes du golfe Persique pour évoquer la future diplomatie concernant l’Iran. Dans le même temps, Bush s’est mis au vert. Les mollahs qui avaient pendant longtemps privilégié une entente avec les républicains étant très méfiants vis-à-vis des démocrates ont conclu que Bush était désormais hors-jeu. Ainsi quand Téhéran a poussé le Hamas à rompre la trêve, ce n’était pas une offensive contre Bush, mais contre Obama et pour créer un désordre qui le déstabiliserait dès son arrivée à la Maison-Blanche. Téhéran a été pris par surprise par un adversaire qu’il croyait hors-jeu. L’administration Bush reste impliquée car elle espère inscrire l’entente avec les mollahs comme une victoire pour le parti républicain.

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L’erreur de jugement des mollahs (fin de la trêve) et ses conséquences (offensive israélienne et alliance muette internationale pour achever le Hamas et affaiblir Téhéran) montrent l’extrême dynamisme de l’affrontement entre les mollahs et les Etats-Unis.

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C’est un jeu de dominos avec des pièces piégées, c’est aussi un jeu où celui qui abandonne perdra tous ses gains. Le régime des mollahs s’en mord les doigts d’avoir rompu la trêve, il est conscient de sa possible défaite, mais n’étant pas capable d’abandonner ses gains, il a immédiatement réactivé ses lobbyistes pour faire abandonner la partie par l’adversaire. Le journaliste Malbrunot a parlé du « saut qualitatif » des missiles du Hamas pour mettre en garde contre l’offensive hostile aux mollahs, et un certain Thierry Coville, membre notoire du lobby parisien du régime, a déploré l’absence d’une politique iranienne de la France qui devrait selon lui être le dialogue avec Téhéran, pour entraîner les Etats-Unis dans son sillage.

Malgré ces interventions, la partie continue produisant son lot quotidien de cadavres et le jeu continuera car ses deux principaux joueurs, les mollahs et les Américains, ont d’énormes intérêts en jeu (la domination du monde pour les Américains et la survie d’un régime opaque fondé sur le partage mafieux des gains pour les mollahs). Mais le jeu continue aussi parce que chacun peut compter sur la complicité d’un intermédiaire armé.

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